Mist.

Ne vous fiez point aux apparences

Mist. Une solitaire. Maigre, famélique au pelage sale. Elle ne diffère pas tant d'un autre solitaire. Les privations ont beaucoup gêné sa croissance et la jeune sans-clan se retrouve avec une taille nettement en dessous de la moyenne de son espèce, en plus de ses côtes apparentes et son pelage arraché là où les os raclent sa peau. Cinq à six lunes, sans plus, qu'on lui donnerai. La pitié ou la compassion vient vite, trop vite avec cette dame. Faites donc attention à elle, faites donc attention au démon que peut cacher une rôdeuse affamée.

Son pelage est mi-long, quoique miteux et en piteux état. Majoritairement noir, il change en un blanc un peu crème sur sa poitrine et une partie de son ventre, alors que le bas de son dos arbore des reflets bruns-roux. Et, couleur vive au milieu de cet amas de fourrure emmêlée et terne, deux pupilles vert-jaune étincelantes, montrant ce qu'elle veut faire croire à souhait.

Les flammes de mes yeux ne s'y limitent pas

Ne vous fiez point aux apparences et elle saura vous le faire comprendre. Mist n'a rien de la rôdeuse effrayée cherchant un clan, ni de la chatte domestique abandonnée trop tôt pour la vie sauvage. Mist est une battante toujours dynamique.

La première chose que vous remarquerez, c'est évidemment que la vie de solitaire lui convient parfaitement; froide, distante et agressive. Agressive, autant insister. Et farouche. Si elle ne s'enfuit jamais à l'approche d'un autre félin, elle saura lui montrer subtilement une façon de lui dire dégage (avec les crocs et les griffes). Territoriale, elle défend sauvagement son maigre bout de territoire, et interdira même tout passage de chats de clan par les terres des solitaires.

Rancunière à l'extrême, invivable et surtout, rebelle. Aucune loi ne la retient, aucune. S'il faut traverser le gué pour avoir un semblant de nourriture, elle le fera. Aucune limite, vous dis-je. Mist ne craint pas plus les hommes que ça, et n'hésitera nullement à piller leurs poubelles pour sa survie. Elle n'a pas peur de se battre et même devant plus gros qu'elle; provoquatrice et sarcastique, cette demoiselle...

La facette de sa personnalité qu'on tient tant à évoquer, c'est bien sûr qu'elle est totalement anti-clans et les méprise plus que de sales cabots des villes. Elle les déteste simplement. C'est à cause d'eux qu'ils vivent désormais en paria, dans une montagne inhospitalière, se battant avec les autres solitaires. Si la plupart ont oublié cette revanche qu'ils ont promis de prendre, elle s'en souvient. A tendance facilement égoïste et a fermé son coeur à tout sentiment. En outre, elle est imprudente -comme vous pouvez vous en douter - et souvent impulsive et lunatique. Et sa survie controversée par le fait qu'on ne lui a jamais appris à chasser, elle ne la doit qu'à d'imprudents actes, de vol ou de profitage de bipèdes par exemple.

Mais surtout, elle est rusée, terriblement rusée pour compenser une bonne partie de ces défauts. Provoquer des disputes entre deux ou trois solitaires, elle a déjà fait. Fouineuse, et pour peu qu'elle se serve de sa tête, bien plus dangereuse que vous ne le penserez...
 

Cherchez en arrière et vous trébucherez dans l'avenir.

Du haut de ses neuf lunes, Mist est une jeune solitaire. On pourrait dire qu'elle a eu une vie compliquée, mais on ne le dit pas. Parce qu'elle est une solitaire, et qu'une solitaire n'a pas à avoir une vie simple. Parce que n'importe quel solitaire aura eu une vie agitée, qui fait d'eux des chats peu fréquentables. Et qu'elle n'a pas échappé à cette règle-là. Que si les chats de Clan leur ont ravis leurs terres, les condamnant à cette vie-là. Alors on pourrait dire que cette vie a été banale. Sans but, normale. Mais elle l'oublie. Elle l'oublie pour avancer.

Un frère. Une mère. Les deux seuls félins que la chatonne connaissait dans l'obscurité de la tanière. Avec la faim en prime. Pourtant, elle ne pouvait s'en plaindre. N'était-ce pas la seule vie qu'on lui avait montré? Cette dure sensation - la faim, le froid mordant, et la menace constante - de quoi? Elle ne le savait pas. Juste qu'il s'agissait d'une menace. Plusieurs, même. Il y avait cet ennemi mystérieux appelé Clan, que sa mère évoquait parfois, tendue. Il y avait renard, blaireau et autres chats. Les ennemis du dehors. Les ennemis inconnus qui les faisaient frémir.

Enfin, elle et sa mère. Pas son frère. Répondant au nom d'Oracle, son frère gris, noir blanc. Il ne leur ressemblait pas. Mais elle ne lui en voulait pas tant que ça, d'être bien plus violent. Mist était plus petite que lui. Il n'y a rien d'autre à dire de cette enfance-là. Sous la menace du Clan. Ennemi invisible.

Vous pouvez déjà dire qu'il n'y a pas un Clan, il y en a cinq. Mais cet ennemi ne fut pas le premier qui assena un coup sur le trio de félins. Une femelle affaiblie par la maternité. Deux chatons, à peine sevrés. Contre quelque chose. Quelque chose qu'elle n'avait jamais vu. Un monstre. Un museau noir et blanc, deux petits yeux noirs. Des crocs carnassiers, un air affamé. Tout ça à la fois. Une apparition effrayante se glissant dans leur buisson tanière, saccageant, mordant, griffant. Attrapant sa mère, la secouant dans ses dents jusqu'à ce qu'elle devienne comme les proies mortes, immobile, complètement immobile, les yeux voilés. Le blaireau tournant sa tête vers elle, effrayée et glacée par la peur. Courir. Courir pour sa vie.

Solitaire. Seule. Sans personne, dans cet endroit perdu. Mendier les bipèdes, voler, tenter vainement de chasser, pour survivre tout était à prendre. Pour résister. Pour tenir un jour de plus malgré ces privations. Clan, ce mot prit enfin sa signification. Les voleurs de territoire. Les ennemis. Pire que le blaireau qui avait pris sa mère (et peut-être son frère), pire que n'importe lequel des prédateurs. Pire que tout. Ils avaient ravis les terres les plus giboyeuses. Ils avaient dû se battre pour ce morceau de roche abandonné et stérile.

C'était des chats. Comme elle. Comme son frère, sa mère, les solitaires. Ca n'était pas des chats, non. C'était une bande de lâches et voleurs qui s'abritaient derrière de futiles règles. Ne franchissez pas les frontières. Ne chassez pas à moins d'un kilomètre de nos territoires parce que vous risquez de nous piquer nos proies. Respectez nous. N'allez surtout pas dans les lieux sacrés. Vénérez le clan des étoiles.

Futile. Inutile, inutiles remparts d'une bande de lâches pour tenir à distance la bande de pouilleux qu'ils étaient. Une bande de voleurs. De profiteurs. Et qui osaient encore les accuser d'avoir ce bout de terre, de ne pas les avoir rejoint. La guerre, la guerre n'était pas finie. Ce n'était pas pour le confort, non. C'était pour vivre. Simplement, c'était la survie. Les terres qui leur appartenaient leur seraient rendus.

Et ça, elle s'en assurerait. Elle-même, s'il le faut.